Biographie d'Esope.

VIIe siècle av. J.-C. - VIe siècle av. J.-C


La légende plus que la réalité historique.

D'après Plutarque, c’était un esclave, prisonnier de guerre, laid et boiteux (son nom signifie « pieds inégaux »), bossu et bègue, qui contait avec esprit des apologues et des récits familiers.

Selon une hypothèse de M. L. West (La fable, Fondation Hardt, Vandœuvres-Genève, 1984), c'est à Samos que se serait formée sa légende.

Au fil des siècles, celle-ci ne cessa de s'enrichir, pour prêter à Esope des aventures extraordinaires.

Au Ve siècle, on avança l’idée qu’Ésope était un être laid et difforme et presque entièrement privé de l'usage de la parole. Après avoir rêvé que la fortune lui déliait la langue, il s'éveillera un jour guéri de son bégaiement.

Acheté par un marchand d'esclaves, il arrive dans la demeure d'un philosophe de Samos, Xanthos, auprès duquel il rivalisera d'astuces et de bons mots avant de réussir à se faire affranchir.

Un siècle plus tard, la légende raconte que la fabuliste se rend alors auprès de Crésus pour tenter de sauvegarder l'indépendance de Samos et il réussit dans son ambassade en contant au roi une fable. Il se mettra ensuite au service du « roi de Babylone », qui prend grand plaisir aux énigmes du fabuliste.

Mais possédé par le désir de voyager, il se rend en Grèce et s'arrête notamment à Delphes.

Les raisons de sa mort restent obscures. Selon le témoignage de Rhodopis, ancienne courtisane de la cour d’Amasis (corroboré plus tard par celui d’Héraclide et par un scholiaste d’Aristophane) sa mort aurait été violente. Accusé d’avoir commis un sacrilège en volant une coupe d’or du temple d’Apollon à Delphes, il aurait été précipité du haut d'une falaise non loin de la cité.

 

Ces récits amplifiés au fils des siècles, et l'humour au sens politique.

Tout le récit de la vie d'Ésope est parcouru par la thématique du rire, de la bonne blague au moyen de laquelle le faible, l'exploité, prend le dessus sur les maîtres, les puissants. En ce sens, Ésope est un précurseur de l'anti-héros, laid, méprisé, sans pouvoir initial, mais qui parvient à se tirer d'affaire par son habileté à déchiffrer les énigmes.

La Fontaine transcrit la légende dans "La vie d'Esope le Phrygien", le cite parmi ses inspirateurs dans la préface du Recueil n°1 Livre n°1, puis lui rend hommage dans de sa dédicace à Monseigneur le «Dauphin» :

Je chante les héros dont Esope est le père,
Troupe de qui l'histoire, encor que mensongère,
Contient des vérités qui servent de leçons.
Tout parle en mon ouvrage, et même les poissons:
Ce qu'ils disent s'adresse à tous tant que nous sommes;

Je me sers d'animaux pour instruire les hommes.
[...]

 

L’helléniste Jacobs en fait un pur « produit » de l’époque des tyrans (tout le VIe siècle) alors que la liberté de s’exprimer devient plus dangereuse. Selon lui, la fable aurait été d’abord employée à des fins politiques. Les penseurs ne pouvant exprimer leurs idées directement à la foule l’auraient fait de manière détournée par le biais de la fable.

L'origine des ysopets.

En raison du nombre de fables que cette légende comprenait, celles-ci ont dès lors pu commencer à circuler de façon autonome, à la façon de bons mots qu'on se racontait. Par la suite, des fables antérieures auraient été réattribuées à cette source, qui jouait le rôle d'un recueil. Il faut ajouter que, le grec ne possédant pas de terme spécifique pour désigner la fable, le nom d'Ésope a servi de catalyseur, (d'où les ysopets) et ce d'autant plus facilement que toute science, toute technique, tout genre littéraire devait chez eux être rattaché à un « inventeur ». Ainsi s'explique, en partie, qu'Ésope soit si vite devenu la figure emblématique de la fable.

Le premier recueil de Fables est dû à Démétrios de Phalère vers 325 av. J.-C.. Le recueil original est perdu. Le recueil que connaissait La Fontaine comprenait 127 fables.

Les fables d'Ésope étaient écrites en prose et sans prétention littéraire. Cela a fait dire à Hegel : « La prose commence dans la bouche d'un esclave ; aussi le genre tout entier est prosaïque » (Esthétique).

Les fables d'Ésope seront reprises et traduites en latin par Phèdre. Babrias en produira de nouvelles (IIe siècle av. J.-C.).

Planude, un moine byzantin du XIVe siècle popularisera une Vie d’Ésope à partir d'un matériau datant probablement du Ier siècle.