Corbeau voulant imiter l'Aigle (Le)


Recueil : I parution en 1668.
Livre : II
Fable : XVI composée de 27 vers.

La Fontaine
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L'Oiseau de Jupiter enlevant un mouton,
Un Corbeau témoin de l'affaire,
Et plus faible de reins, mais non pas moins glouton,
En voulut sur l'heure autant faire.
Il tourne à l'entour du troupeau,
Marque entre cent Moutons le plus gras, le plus beau,
Un vrai Mouton de sacrifice :
On l'avait réservé pour la bouche des Dieux.
Gaillard Corbeau disait, en le couvant des yeux :
Je ne sais qui fut ta nourrice ;
Mais ton corps me paraît en merveilleux état :
Tu me serviras de pâture.
Sur l'animal bêlant à ces mots il s'abat.
La Moutonnière créature
Pesait plus qu'un fromage, outre que sa toison
Etait d'une épaisseur extrême,
Et mêlée à peu près de la même façon
Que la barbe de Polyphème.
Elle empêtra si bien les serres du Corbeau
Que le pauvre animal ne put faire retraite.
Le Berger vient, le prend, l'encage bien et beau,
Le donne à ses enfants pour servir d'amusette.
Il faut se mesurer, la conséquence est nette :
Mal prend aux Volereaux de faire les Voleurs.
L'exemple est un dangereux leurre :
Tous les mangeurs de gens ne sont pas grands Seigneurs ;
Où la Guêpe a passé, le Moucheron demeure.
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Source Esope, L'aigle et le choucas - Aphtonius, Fable du Choucas.

Remarque :
Un aigle, s'abattant sur un rocher élevé, enleva un agneau. Un choucas qui l'avait vu, par jalousie, voulut l'imiter. Il se précipita violemment sur un bélier. Mais ses ongles s'étant embarrassés dans la toison de la bête, le choucas, malgré ses battements d'ailes, ne pouvait se dépêtrer. Le berger, devinant ce qui s'était passé, s'empara de l'oiseau. Il lui coupa le bout de ses grandes plumes, et, le soir venu, le rapporta chez lui, à ses enfants. Ceux-ci, lui demandant quel était cet oiseau :
- A ce que je sais, dit-il, c'est un choucas; à ce qu'il croit, c'est un aigle. Celui qui se mesure avec les puissants, non seulement n'aboutit à rien, mais en plus de l'insuccès, il est la moquerie et la risée de tous. (Esope).
Images

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Corbeau voulant imiter l'Aigle (Le)
Jean-Baptiste Oudry
Peintre et graveur français (1686 -1755)

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Corbeau voulant imiter l'Aigle (Le)
Jean-Jacques Grandville
Illustrateur français (1803-1845)

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Corbeau voulant imiter l'Aigle (Le)
Gustave Doré
Illustrateur français (1832-1883)
EsopeAigle et du Corbeau. (De l')


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FableUn Aigle venant à fondre du haut des airs sur un Mouton, l'enleva. Un Corbeau qui le vit crut en pouvoir faire autant, et volant sur le dos d'un Mouton, il fit tous ses efforts pour l'emporter, comme l'Aigle avait fait ; mais ses efforts furent inutiles, et il s'embarrassa tellement les pieds dans la laine du Mouton, qu'il ne put jamais se dégager ; de sorte que le Berger survenant, prit le Corbeau et le donna à ses enfants pour les amuser, et pour leur servir de jouet.

SensIl ne faut point estimer selon la vertu d'autrui: mais selon la sienne propre. Qu'un chacun se mesure selon son pied. Que chacun vueille et entreprenne ce qu'il pourra.